Placer l'art et la culture au service de l'éducation

Mettant en avant la valeur du patrimoine culturel haïtien, les enseignants du projet « Éduquer par les arts dans la commune de Kenscoff » ont pris comme référence l'œuvre emblématique de Jacques Roumain, « Les gouverneurs de la rosée » (1944). Ce chef-d'œuvre de la littérature haïtienne a servi de référence pour sensibiliser les élèves sur les enjeux fondamentaux du développement durable et de la cohésion sociale tels que l'environnement, les droits de l'homme, la préservation du patrimoine culturel et la prévention de la violence à l'égard des femmes et des filles.

Dispensés de manière intensive pendant un mois entre août et septembre 2025, ces ateliers d'éducation artistique d'une durée totale de 36 heures sont le résultat d'une formation précédente de 16 éducateurs dans les différentes matières avec 4 artistes d'appui. De leur côté, les directeurs et les administrateurs des écoles participantes ont été formés à l'élaboration et à la gestion financière des programmes éducatifs et culturels.

Une Fondation dotée d'une grande expérience dans l'exercice de sa vocation éducative et culturelle

Les activités ont été coordonnées par la Fondation Culture Création avec l'appui technique du ministère de l'Éducation National (MENFP) et le soutien financier de l'Agence Espagnole de Coopération Internationale pour le Développement (AECID).

La Fondation Culture Création n'en est pas à son coup d'essai dans ce travail qui a débuté il y a plus de trente ans et qui a bénéficié à des milliers d'enfants en Haïti. « Éduquer par les arts » est une initiative qui vise à promouvoir l'art et la culture haïtienne auprès des écoliers et des jeunes, ainsi que leur créativité. Mais, surtout, le programme cherche à contribuer à l'amélioration de la qualité de l'enseignement par les disciplines artistiques en intégrant, à long terme, l'art en tant que discipline à part entière dans le programme scolaire, au-delà des activités parascolaires.

De plus, la situation complexe dans le pays, avec l'attaque par des groupes terroristes sur la population de Kenscoff depuis le début de l'année 2025, a obligé les institutions participantes à s'adapter à un contexte chargé de traumatismes. À cette fin, l'intervention cherche à utiliser l'art comme outil pour renforcer la résilience de l'ensemble de la communauté scolaire.

Face à l'adversité, une relocalisation réussie

Initialement prévues à Kenscoff, les activités du projet « Éduquer par les arts » n'ont pas pu être réalisées dans les locaux des quatre écoles sélectionnées de la municipalité. La violence armée, qui s'est installée dans cette zone rurale pour fermer le passage qui reliait la zone métropolitaine au département du Sud-Est à travers la montagne, l'a empêché. Malgré cette adversité, s'appuyant sur la ferme détermination des acteurs éducatifs et des parents à poursuivre les activités, et en concertation avec l'Ecole Fondamentale d'Application Kenscoff (EFACAP) et les directeurs des centres éducatifs, la Fondation Création Culture a pris la décision préventive de relocaliser les quatre écoles bénéficiaires vers d'autres centres de la commune de Pétion-Ville,  permettant de meilleures conditions de sécurité lors du développement des ateliers artistiques.

Écoles participantes relocalisées :
· L'École fondamentale d'application de Kenscoff a été accueillie par l'École nationale du Guatemala
· L'École nationale de Furcy, également hébergée par l'École nationale du Guatemala
· L'école congréganiste nationale Marie Louise de Jésus de Kenscoff a été accueillie par l'école Notre Dame du Rosaire
· L'école mixte Sainte Philomène de Kenscoff a été accueillie par l'école mixte Saint-Gabriel.

Nous remercions les communautés éducatives d'accueil pour leur solidarité!

Malgré les difficultés liées à la réinstallation (qui a coûté la vie à 25 % des bénéficiaires initialement prévus), plus de 250 enfants et jeunes participants ont fait preuve d'enthousiasme et d'une résilience exemplaires. Les arts plastiques ont eu une forte mobilisation dans les 4 écoles où les élèves ont réalisé de belles fresques murales et peintures. La danse était d'un grand intérêt, en particulier chez les filles, leur permettant d'explorer des rythmes patrimoniaux tels que Rabòday, Yanvalou, Ibo et autres. La musique et le théâtre sont également des disciplines qui suscitent un grand intérêt. Des percussions, des chants et des morceaux de musique et de danse traditionnels ont résonné, et un bonheur sincère s'est lu sur les visages des élèves. Chaque école peut s'enorgueillir de sa production originale, reflet de son histoire et de son identité.

Ces moments de création et de rencontre, auxquels ont assisté le Maire de Kenscoff, Jean Massillon, et l'ambassadeur d'Espagne en Haïti, Marco Peñín Toledano, ont signifié une parenthèse dans la tension et l'angoisse vécues par la population de cette municipalité rurale, et ont permis de raviver l'espoir et de renforcer les liens communautaires.

À l'instar de l'œuvre de Roumain, ces activités sont une ode à la créativité et à la solidarité, valeurs essentielles dans tout processus de développement social. Le projet démontre que, même dans les contextes les plus fragiles, l'art et l'éducation peuvent être de puissants alliés pour soutenir la santé mentale dans les écoles touchées par les conflits, en plaçant la promotion de la paix et de l'entraide au cœur du bien-être.